MOTOGP 2022 : L’ONU DÉNONCE UNE VIOLATION DES DROITS DE L’HOMME A MANDALIKA

 

 

Mandalika se trouve sur la minuscule île de Lombok, on est en Indonésie  à 35 minutes d’avion de l’île architouristique de Bali ou encore cinq heures de ferry par la mer.

L’île de Lombok a depuis des années bénéficié du statut de petit paradis pour les gens qui n’en pouvaient plus de la pression touristique de Bali, une ile sauvage, pleine de couleurs, accueillante mais pas agressive comme l’est sa mondialement connue voisine.

 

LOMBOK, UN PARADIS

 

Les excursions d’une journée sont fréquentes, les ferries fonctionnent H/24.

Puis, on le sait depuis longtemps, les Indonésiens ont décidé de construire un nouveau circuit pouvant recevoir le MotoGP, une idée dont tout le monde rêve à commencer par les Indonésiens, leur état est un pays de moteurs.

De fans de sports mécaniques mais c’est aussi un pays où l’on se déplace quasiment qu’à moto.

C’est aussi, du point de vue commercial, le pays le plus prometteur d’Asie, quelques chiffres, en sachant que l’Indonésie est composée de 16 000 îles et avec 260 millions d’habitants…

Six millions et demi de motocyclettes vendues en 2019 (on sait que partout 2020 a été une tragédie), Honda y est leader du marché, les motos sont souvent des tricycles à usage utilitaire mais aussi des moyens de transport pour des millions de gens qui vont bosser.

Pour les constructeurs, c’est une sorte de terre promise et ils insistaient depuis longtemps pour qu’un GP moto y soit organisé.

 

LA VISITE OFFICIELLE DE GENS QUI PÉSENT TRÉS LOURD

Et donc, le pays ne manque pas d’argent, c’est en particulier une éponge à pétrole, une association de financiers, plus l’Etat indonésien ont mis la bagatelle de 30 milliards sur la table.

Un des seuls endroits régulièrement desservis et où il y a de la place est Lombok, île en plus mondialement connue et manquant de structures touristiques (ce qui en fait son charme d’ailleurs).

Dorna a tout de suite dit oui, les promoteurs du circuit ont les reins solides, les travaux ont commencé et le circuit était en fait proposé sur un système de rues et de routes servant le reste de l’année au trafic local, avec bien sûr des zones de sécurité énormes en cas de chute.

Ce n’est pas un circuit urbain comme Macao où en cas de pépin, on a le choix entre le mur… et le mur.

Une vidéo a été tournée à l’occasion de cette visite, où l’on voit surtout qu’il reste beaucoup à faire, même le goudron n’est pas terminé et les infrastructures hôtelières et touristiques prévues n’ont pas encore reçu un coup de pioche ou une brouette mais bon, tout le monde était content.

Cette vidéo a vite retirée de facebook par Dorna… allez savoir pourquoi…

Dorna, la FIM se sont rendus sur place après le deuxième GP du Qatar, ils ont rencontré les responsables financiers et politiques du projet.t et les infrastructures hôtelières et touristiques prévues n’ont pas encore reçu un coup de pioche ou une brouette mais bon, tout le monde était content.

Cela dit il faut aller vite, le WSBK est censé venir courir ici dès cette année, en novembre et Dorna aimerait organiser une séance de tests pour les pilotes avant qu’ils viennent courir sur ce nouveau circuit en 2022 en MotoGP. 

Le discours de Camelo Ezpeleta, boss de Dorna, a parfaitement résumé la situation.

 

CARMELO EZPELETA A EXPLIQUÉ PPOURQUOI TOUT LE MONDE VEUT CE CIRCUIT

« La visite de Lombok a été très fructueuse et nous pouvons confirmer que le Mandalika International Street Circuit sera l’un des rendez-vous les plus importants du calendrier à l’avenir. Nous savons aussi que les fans indonésiens y assisteront massivement et que les GP deviendront l’un des plus emblématiques de toute la saison. L’Indonésie est un marché clé, non seulement pour Dorna, mais également pour toutes les parties prenantes du Championnat. »

On s’est bien gardés d’évoquer entre gens de compagnie le fait que la commission des droits de l’homme de L’ONU ait dénoncé la construction de ce projet.

On imagine bien que les abords de l’île sont constellés de petites habitations et de mini surfaces agricoles, les bords de l’océan sont couverts de cabanes de pêcheurs.

 

LA PÊCHE EST UNE ACTIVITÉ IMPORTANTE A LOMBOK (OUI IL YA DES ÉLÉPHANTS SUR L’ILE !)

Or, s’il existe dans les pays civilisés des procédures légales d’expropriation, un projet légal peut donner lieu à expulsion mais avec des compensations souvent importantes (le fond de la retenue du barrage de Serre-Ponçon a été un bon exemple, la population est partie le cœur serré de voir ses terres englouties mais avec un avoir financier largement suffisant pour refaire sa vie, plus des installations de service public comme l’électricité, le téléphone, le train etc…) mais clairement à Lombok on a procédé autrement.

Autrement dit les expulsions ont été violentes et sans aucune compensation.

Les habitants de Lombok ont encore de la chance, ils ne sont pas mis au travail forcé (quoique je n’aie aucune info à ce sujet) comme c’est le cas dans d’autres pays de la région.

Bon, d’un côté trois milliards de dollars.

 

INDISCUTABLEMENT TROIS MILLIARDS INVESTIS C’EST DE L’EMPLOI MAIS POUR QUI?

De l’autre un pays où le salaire mensuel moyen est de 360 euro, d’une part pas de quoi se payer des avocats et d’autre part nous ne sommes pas dans un pays de droit.

Ce qui embarrasse Dorna… mais sans plus.

On y sait bien qu’à l’instar de l’argent qui n’a pas d’odeur, le sport n’a pas d’honneur, en tous cas en dehors des podiums.

La liste est longue, dans les sports classiques (l’exemple type c’est Berlin et ses JO en 1936, devant glorifier la race aryenne mais où le petit peintre autrichien à la moustache sanglante a quitté sa loge, pris de fureur, quand le noir américain Jesse Owens l’a ridiculisé avec quatre médailles d’or) les sports mécaniques ne sont pas plus moraux, la F1 a organisé son GP d’Afrique du Sud le jour de pendaison d’un habitant noir.

Et puis il y a le rallye raid, il est vrai que l’Arabie Saoudite est un paroxysme mais on a souvent traversé des pays peu recommandables…

Bon, quand on créée un événement sportif il est de mise de publier des chiffres de retombée économique sur la région qui entoure le stade ou le circuit.

 

 

Nul doute que nos milliardaires indonésiens vont se dépêcher de donner un chiffre incroyablement élevé, il est vrai que les pêcheurs pourront emmener des plongeurs en mer alors que leurs femmes arriveront peut-être à payer les études primaires des enfants en bossant à la lingerie des hôtels.

J’imagine que Desproges aurait ajouté « Alors de quoi se plaignent-ils ces cons de pauvres » ?

Bien sûr, la protestation et la mise en cause de l’ONU n’arrêteront pas le projet et n’arriveront pas à le moraliser, c’est toujours comme ça.

Dorna, pour sa part, dira peut-être dans un premier temps qu’elle ignorait tout de ce problème (cela dit ils ne vont pas durer longtemps comme ça, ça commence à pétouiller d’un peu partout) puis ils expliqueront avec les promoteurs que la population de Lombok profite pleinement de cet apport massif d’argent lors des compétitions (et toute l’année, n’oublions pas les fameuses infrastructures sportives) et on en restera là…

Les ex vrais routards regretteront le Lombok qu’ils ont connu, mais tout le monde s’en fout, ils n’avaient pas d’argent.

 

AUTOUR DU PROJET DE CIRCUIT

 

Mais les dizaines de milliers de spectateurs  attendus dépenseront ils un argent fou ?

Même si l’Indonésie est un pays riche, faire entrer cet argent dans les poches des habitants serait invraisemblable.

Le salaire moyen officiel, en incluant ces ventes de pétrole est de 12 000 dollars par an, le salaire réel moyen est de 338 dollars mensuels, on doute qu’ils aillent claquer des fortunes dans des endroits qui de toutes façons ne sont pas faits pour eux.

Soyez tranquilles. La raison d’être de ce papier n’est pas de créer un immense mouvement de colère et de refus, je suis journaliste, pas l’Abbé Pierre, le but n’est même pas de réveiller en qui que ce soit un quelque soit début de bonne conscience, c’est seulement une info, gênante certes mais pour qui ?

Show must go on…

 

Jean Louis BERNARDELLI

Images MotoGP et constructeurs

 

 

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