PHILIPPE DEBARLE EST MORT

 

 

 

 

 

Notre ami, le journaliste spécialiste moto Philippe Debarle, nous a quitté ce vendredi 9 octobre 2020

 

Il est de bon ton, quand quelqu’un de connu disparaît, on a vu ça quand Ayrtn Senna s’est tué le dimanche 1er mai 1994, de dire que l’on était son meilleur ami!

Après, on en profite pour parler de soi, ce que je ferai mais de façon discrète, juste pour les points de repère…

Ami évidemment, nous avons vécu des tas de trucs phénoménaux ensemble, mais surtout complice…

C’est le type de relation indestructible qui existe parfois, rarement, mais c’est alors d’une force qui défie le tsunami, l’ouragan, le maelström, l’héliocentrisme de Copernic et Galilée, ou encore l’éruption de l’Eylafjalljökull !

Philippe était un mec incroyable, qui a monté des coups ou accompagné des moments historiques toute sa vie.

Je ne ferai pas de déroulé de sa vie avec les dates, d’abord je n’ai pas assez de mémoire pour ça ensuite les dates finalement ça ne définit pas quelqu’un. (A part François Premier en 1515).

 

LA COMPLICITÉ, L’ARME ABSOLUE DE PHILIPPE (ICI A DROITE)

 

Je sais qu’il a commencé à Moto Journal, il a même été le correspondant aux USA de ce canard durant trois ans (sacrée époque, on avait des envoyés spéciaux aux USA !) et il avait du coup une connaissance incroyable des sports mécaniques US, il m’a fait découvrir le Dirt Track un truc de bouseux mais absolument sublime…

Il était photographe sur les Grands Prix de vitesse quand je l’ai connu à Moto Revue, ses clichés étaient juste superbes, finalement à bien y réfléchir ce mec savait tout faire et il le faisait bien.

Les Grands Prix, Daytona et les grandes classiques, il en était en quelle que sorte le scribe par l’image, le scribe est ce personnage chargé d’écrire l’histoire durant l’Egypte ancienne et dont on gardé pas mal d’effigies et de statues.

Il a bossé à TF1, sur l’émission culte Auto Moto, toujours en amenant des idées plus folles que les autres…

 

LE MANS 1980: 70 000 SPECTATEURS

 

Un jour par exemple, aidé Dominique Guymont, producteur d’Auto Moto et associé à Gilles Gaignault, fondateur et rédacteur-en-Chef de ce site AutoNewsInfo, qui racontera ça mieux que moi, il a eu l’idée de lancer le dragster en France.

A l’époque j’étais déjà un peu speaker sur le trial indoor, et il m’a demandé de tenir le micro.

Un truc démentiel.

C’était au Mans dans la ligne droite, sur une distance de 400 mètres, on ne pouvait pas faire mieux, car ces engins dont le rôle consiste à aller le plus vite possible en ligne droite mettent un paquet de temps à s’arrêter, parfois à l’aide de parachutes…

Philippe et Gilles avaient fait venir d’Angleterre, de Suède, de Hollande des pilotes et des engins incroyables, on devait bosser en bordure de piste avec des casques antibruit car ces engins, développant  5000 cv (10 000 aujourd’hui) et fonctionnant au nitrométhane, un truc bien dégueulasse à l’odeur insupportable, on portait aussi des masques !

Mais avec cette puissance considérable, en 400 mètres certains véhicules touchaient pratiquement les 400 km/h !

Côté public, Le Mans avait prévu 10 000 billets, et encore ils prévoyaient large.

Il y a eu au final 70 000 spectateurs groupés dans la ligne droite, à la fin pour le public, l’ACO arrachait des pages de cahier avec un tampon dessus pour servir de billets !

Inutile de vous décrire l’ambiance, surtout quand les pilotes de moto Hollandais se sont mis à faire des « flaming burn out », ils chauffaient les pneus au max sur place en bloquant le frein avant et balançaient de l’essence, les flammes sous la roue arrière montaient à dix mètres !

Ce qui se fait aussi dans la catégorie auto, la preuve …

 

FLAMING BURN OUT (VOLONTAIRE)

 

Hallucinant et vu le succès, on a recommencé l’année suivante à Albi, au Paul Ricard et surtout à Monza en Italie, où j’ai eu l’honneur de faire le speaker en italien !

Voilà ce qu’a réussi ce diable de Philippe…

C’est d’ailleurs grâce à cette course au Mans que je suis entré à Auto Moto, je dois donc une de mes meilleures 1001 vies à Philippe, les rouleaux pour démarrer les dragsters étaient cassés, il ne s’est rien passé durant une heure, j’ai tenu le crachoir…

Et Jacques Bonnecarrère, le producteur d’Auto Moto m’avait fait venir le lundi pour me dire qu’un mec capable de tenir le micro une heure sans qu’il se passe quoi que ce soit devait faire de la TV…

Merci Philippe pour ça et tout le reste.

Cette course au Mans, c’était en 1980.

Du coup, une revue spécifique pour les dragsters a été créée par Gilles Gaignault en partenariat avec l’éditeur Michel Hommell en mai 1981, le journal s’appelait Nitro, immense succès et bien entendu, Philippe était de la partie…

Et puis il y a eu Bercy.

 

LE SUPERCOSS DE BERCY, 14 000 SPECTATEURS PAR SOIR, TROIS JOURS D’AFFILÉE

Le Supercross de Bercy.

Pour des dizaines de milliers de fans, cette époque donne encore le frisson, Van Halen, dont le morceau (l’intro) « Jump » avait été passé en boucle lors de cette épreuve, est mort il y a quelques jours et de nombreux fans de l’époque m’ont écrit pour me dire  à quel point ils étaient tristes.

Forcément Philippe parlait parfaitement l’américain et comme à cette époque des débuts de Bercy, avant l’arrivée de Jean Michel Bayle, les podiums étaient US quasiment à 100% l’ami Debarle en faisait un vrai spectacle, les interviews après course…

Je suis ensuite parti sur d’autres défis professionnels et nous nous sommes perdus de vue, avec quand même un déjeuner rituel à la Nation, et quand je suis revenu, recruté par Gilles Gaignault, sur la double recommandation de l’ami Philippe Debarle et de l’autre Philippe ‘Phiphi’ Vassard, comme responsable de la moto et des Grands Prix sur ce site AutoNewsInfo, j’ai retrouvé celui que j’appelais « Mon phiphi » qui bossait à l’époque sur un autre site, puis a participé à cette marche triomphale de Paddock GP, il y a écrit jusqu’au bout.

Si, un jour, pour le treize heures de TF1, le présentateur vedette m’avait commandé un reportage où il ne voulait pas voir une bagnole.

Avec cette idée, on a tenu 3’45 d’antenne dans un journal, fait rarissime.

J’étais monté à la cabine de speaker où officiait Philippe, je lui ai juste demandé son secret.

Réponse : « Faut être bavard« …

 

LA CABINE DE SPEAKER EST NOYÉE DANS LA FOULE DU MANS

 

Total de la séquence 14 secondes.

Cette répliqué a fait un tollé à TF1, pour qui pourtant les sports mécaniques étaient bien peu de choses (sauf à la mort de Senna bien sûr…).

Je sais, mais à l’époque nous ne voyions que rarement, qu’il a été à la création du Superbike, ces courses de motos de série améliorées qui avaient un succès colossal.

Voilà, j’ai encore des pages et des pages à écrire mais elles sont à nous, je veux les garder entre nous.

Mais pourquoi avons-nous pu être complices si longtemps ?

Montaigne disait des raisons de son amitié avec La Boétie « Parce que c’était lui, parce que c’était moi ».

Avec Philippe c’était plus fort que ça, c’est parce que c’était lui, tout simplement.

Il est, je ne peux pas l’écrire à l’imparfait, un personnage unique, vraiment unique, dans un univers où les héros et les prodiges existent à foison, mais voilà, c’est lui …

A sa femme Irmeli, à son fils, AutoNewsInfo offre ce qu’il y a de plus sincère en matière d’amitié et de reconnaissance.

Jean Louis BERNARDELLI

Photos :  DR – Dragsters à Albi et au Mans, SX de Bercy…

 

 ADIEU L’AMI…

 

Philippe Debarle, je l’ai rencontré pour la toute 1ére fois, de façon tout à fait inattendue…

C’était à l’automne 1975 !

Nous sommes descendus tous les deux ensembles pour un reportage simultané en Italie sur les bords de l’Adriatique à Pesaro chez Giancarlo Morbidelli, le marchand de bois qui avait lancé en Championnat du monde moto, une petite 125cc, créée par l’ingénieur Néerlandais Jorg Möller, machine qui venait de remporter le Championnat du monde 1975, avec le pilote Italien, Pierre-Paolo Pileri. Après une halte en Savoie à Sciez, au-dessus de Thonon les Bains chez le pilote René Guili.

Par la suite, nous sommes devenus amis. Avons effectué la tournée Scandinave des GP du Continental Circus, en Suède à Karlskoga et en Finlande à Imatra– où il a rencontré sa future femme Irmeli –  puis en Tchécoslovaquie à Brno, l’été 78.

En 1980 aux USA, invités par JCO, le patron de Sonauto Yamaha à assister à la plus grande course du monde,  les inoubliables 200 miles de Daytona en Floride, épreuve remportée par son pilote, le Français Patrick Pons, nous nous rendons dans la semaine à Gainesville pour rêver et assister aux compétitions de …dragsters, très en vogue là-bas.

De retour en France, nous décidons alors d’offrir au public Français, une 1ére course, le Midland CB Dragster Festival, que nous organiserons au Mans, les 6 et 7 octobre 1980, après avoir loué la ligne droite des stands, au secrétaire général de l’ACO de l’époque, Jean-Pierre Moreau. Evènement qui rencontra un succès phénoménal avec la présence de …70.000 spectateurs payants !

Lui, a ensuite poursuivi sa belle carrière de journaliste et de speaker dans la moto et moi, j’ai choisi de suivre les Grands Prix de F1 et le sport auto.

Les années ont depuis passées mais régulièrement nous nous retrouvions pour partager notre passion pour les sports mécaniques…  Et je passais parfois chez lui, rue de Candy, du côté de la Bastoche, à Paris.

Ces dernières années, je savais qu’il luttait avec courage, contre ce cancer qui le rongeait et qui l’a emporté…

RIP Philippe, tu étais une belle personne, garçon très attachant, un formidable compagnon de route !

Ce soir en apprenant ta disparition, je ressens une profonde tristesse et j’ai à nouveau comme à chaque fois, lors du départ de proches, le cœur qui saigne…

Salut l’ami.

 

Gilles GAIGNAULT

 

 

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