‘AFRICA ECO RACE’ : À DAKHLA, ON RÉVISE AVANT LE BAC… À SABLE !

 

À partir de demain lundi 9 janvier, on sera en Mauritanie dans une immensité sublime de sable, la partie la plus dure du rallye, la journée de repos passée à Dakhla, un endroit superbe du sud marocain, sert aussi de préparation.

Repos ? En fait, cela va servir aux mécanos à démonter les véhicules en petits bouts, ceux qui sont «en malle», les motards qui font leur mécanique eux-mêmes et dont les pièces et les outils sont transportés dans des malles par l’organisateur, passeront une bonne partie de la journée et de la nuit les mains dedans…

 

Certains iront aussi à la plage, qui est juste près du bivouac, quelques pas à faire, le catering (ceux qui s’occupent de la restauration) va bosser sans arrêt, parce qu’il ya une sorte de bar où l’on refait le monde, même les hélicos et les avions vont avoir droit à un petit coup d’œil…

 

 

J’ai reçu d’Alain Rossignol, qui opère sur le terrain avec son complice Jorge Cunha, quelques photos très sympas que je n’ai aucune chance de passer durant le rallye, où le sport prédomine.

 

Le désert est aussi et toujours un voyage, une aventure, des images qui donnent envie de partir.

Salut à mes camarades photographes de Captain Nowhere, que je remercie de dormir deux heures par nuit quand tout va bien, pour notre bonheur … et le vôtre.

 

JEAN LOUIS SCHLESSER

Jean Louis Schlesser est justement en train de réviser son avion.

Il a la grippe, ce qui est, on le sait, physiquement très dur quand on reste chez soi alors pour diriger un rallye en zone désertique, ce doit être une sorte de cauchemar.

En plus, sur ce bivouac de rêve, il vente à décorner les boeufs.

« La première semaine, sur le plan sportif, a vu des très belles spéciales et de très belles bagarres. Dommage qu’Ullevalsetter ne soit plus dans le coup au général suite à une panne, mais on l’a vu hier, il se bat toujours devant. Et puis on entre en Mauritanie, à moto tout peut arriver, on ne sait jamais! En autos et camions, la bagarre entre Serradori et Vasilyev est superbe, ils sont carrément heureux de se battre comme ça sur des terrains aussi variés, il n’y a que 16 minutes entre les deux, en Mauritanie c’est peanuts. Et puis il ya De Rooy qui peut aller remonter encore d’une place au général, il est une minute derrière Vauthier, et il est surmotivé »

Je lui demande si les toutes premières étapes aussi difficiles, c’était voulu, sa réponse est très claire.

« Non, pas du tout, nous, notre truc, c’est d’amener tout le monde au Lac Rose, alors vouloir écrémer dès le début, pas du tout ce que l’on veut faire… Quant aux coureurs, ils sont tous comme des fous, crevés le soir c’est sûr, mais heureux. Tout le monde attend avec impatience d’attaquer cet énorme morceau qu’est la Mauritanie, avec son étape marathon. Après une étape de 450 km,  tous les véhicules seront en parc fermé, assistance interdite, sauf sur le temps de course. Là il va falloir gérer, en plus de courir après le chrono. Mais c’est une belle expérience, que tout le monde attend. »

Alors, avant le grand bac à sable, l’océan de dunes, voilà quelques jolis souvenirs d’une première semaine au Maroc…

De l’ambiance par exemple…

Un bivouac de rêve en bordure de mer, mais la mer créée du vent, des nuages..


Alors qu’en plein milieu de nulle part, la tente caïdale est un endroit où règne la sérénité, après le bruit et la fureur de la journée.

Paradoxe classique du Rallye Raid, du vrai, de l’authentique.

Ambiance tout petit matin, le coeur bat la chamade parce qu’on fonce vers l’inconnu, surtout pour les motos qui partent en premier.

Mais aussi bonheur, celui de l’aventure.

On est totalement sur les traces de Thierry Sabine…

Demain on attaque l’océan, un formidable exercice, violent et délicat à la fois, où les chevaux comptent autant que la finesse de pilotage et l’analyse immédiate du terrain, tandis que le navigateur essaie de maintenir le cap…

Un vrai rallye raid c’est une succession de petits moments paradisiaques, au milieu de nulle part, quelques fûts de kéro qui permettent au rallye de s’enfoncer encore plus loin…

J’adore cette photo, toute simple, d’un moment inattendu et magique…

D’une certaine façon, je pense aux escales de l’Aéropostale de Saint Ex et Mermoz, pas loin de là d’ailleurs…

SMALL IS BEAUTIFUL 

 

Bon, un clin d’oeil aux petits gabarits,  les SSV sont une autre façon de vivre le grand raid, pas facile si le temps est mauvais ou si on mange la poussière des autos qui sont devant, mais ils sont nerveux, envoient bien quand on a besoin de chevaux, légers en cas de plantage, c’est un vrai bonheur de les piloter, et surtout le coût de revient est très inférieur à celui d’une auto, d’un camion.

Ces SSV ne se battent pas seulement entre eux, ils s’attaquent aussi à beaucoup plus gros qu’eux, et ils se marrent comme des fous…

Action !

 

BIG IS BEAUTIFUL

 

Je vous parle tout le temps de Gerard de Rooy, qui, avec son Iveco de 1000 cv, se bat tout devant dans le top 5 du classement autos/camions.

Mais il ya en a plein des camions, il est vrai que l’abandon d’Elisabete Jacinto m’a beaucoup peiné et que du coup j’oublie un peu ses gros camarades de classe.

En voici donc quelques uns…

Ce sont les Belges qui roulent en Man depuis l’abandon de Jacinto.

Deux équipages, celui de Noel Essers et celui de Jan Govaere.

Le très imposant Mercedes de Johan Elfrink.

Qui me rappelle des tas de souvenirs exceptionnels du Paris-Dakar de Thierry Sabine, Mercedes était la marque favorite de Georges Groine, alias « Jojo », un Clermontois qui a roulé dix fois comme concurrent et encore autant dans l’opérationnel du rallye.

Georges était l’adversaire historique de Jan de Rooy, le père de Gerard, qui avait mis le camion à l’honneur dans les sables du Sahara, avec ses DAF à double nez surpuissants.

Les affrontements commençaient dès les prologues qui à l’époque se déroulaient en France, souvent près de Paris, dans une boue immonde mais avec une foule de spectateurs absolument incroyable, qui, pour se réchauffer, chantait, dansait, hurlait de bonheur et n’hésitait pas à aller redresser une moto à terre ou pousser un concurrent auto malheureux (une année Vatanen avait brisé son train avant, ils ont été des dizaines à l’amener au bout du prologue..).

Et oui, pour rouler Iveco, il y a les « Conventional » au gros nez du team De Rooy, il y a aussi des « Cabover« , la cabine est au-dessus du moteur, qui ont une gueule formidable.

Celui-ci est italien (rosso!) et piloté par Corrado Pattono.

Dans la catégorie des gros modules, il ya aussi ces très impressionnants Ford Raptor, il y en a trois en course, deux équipages polonais et un russe.

Ces autos sortent 600 cv et sont les vedettes absolues de la Baja 1000 au Mexique, la « Mother race«  de toutes les courses de désert.

DOMMAGE QUE L’ON N’AIT PAS LE BRUIT AVEC…

PORTRAITS D’UN VILLAGE D’HOMMES

GERARD DE ROOY

Saint Ex a écrit dans un de ses bouquins qu’ensemble, avec ses camarades vivant dans un campement au milieu de nulle part, ils avaient bâti un village d’hommes.
Cette phrase magique, comme tout ce qu’il a écrit, me revient en tête chaque fois que je rencontre des êtres humains dans le désert, qu’ils soient natifs du lieu ou voyageurs.

Voilà quelques héros de cette première semaine de l’Africa Race 2018

VLADIMIR VASILYEV ET SON COPILOTE KONSTANTIN  ZHILTSOV

MATHIEU SERRADORI ET FABIAN LURQUIN

TOMAS TOMECEK, QUI ROULE SEUL DANS SON TATRA

PASCAL THOMASSE ET SON NAVIGATEUR PASCAL LARROQUE

PAOLO CECI

LUIS OLIVEIRA

Voilà, dès demain on attaque ce qui fait de ce rallye le vrai descendant légitime des  organisations de Thierry Sabine, le désert colossal de pierre et de sable mauritanien.

On va en bouffer pendant cinq jours et on va adorer ça, parce que l’on est évidemment venu pour se mesurer à soi-même, pour s’épater soi-même, c’est de la psychanalyse à deux balles mais la vraie vie vaut largement ça…

DREAM…

 

On en a le frisson d’avance…

Jean Louis BERNARDELLI


Photos :
Alain ROSSIGNOL et Jorge CUNHA/ Captain No where