DAMS, grande école préparatoire à la F1

Exemple de réussite française, l’équipe Sarthoise de Jean-Paul Driot, a raflé tous les titres en GP2 et en Formule Renault 3.5 en 2014. Forte de cet exploit inédit et de 26 ans de succès, DAMS est aujourd’hui la référence dans les formules de promotion, un ascenseur direct vers la F1.

 

 

Samedi 22 novembre 2014. Abu Dhabi déploie ses fastes clinquants d’hôtels et de yachts à rallonge autour du circuit de Yas Marina. Mais, sur le muret des stands, les membres de l’équipe DAMS s’en moquent éperdument. Ils retiennent leur souffle. Attendent que le drapeau à damiers s’abaisse enfin sur l’avant-dernière course de GP2 de la saison. Encore quelques secondes, puis la délivrance.

Jolyon Palmer franchit la ligne en deuxième position, suivi à quelques encablures par Stéphane Richelmi, classé cinquième.

C’est fait !

 

 

Ils peuvent s’étreindre et exulter. DAMS vient de concrétiser le premier grand chelem de l’histoire des formules de promotion, autrement dit de s’adjuger les titres pilotes et teams, en GP2 et en Formule Renault 3.5, la même année.

Une réussite exceptionnelle qui ne doit rien au hasard.

Elle est, au contraire, le fruit de vingt six ans de compétition à très haut niveau.

 

 

Une histoire qui s’ouvre et avec succés en 1987 avec GDBA. Equipe de Formule 3000, fondée par Gilles Gaignault, Jean-Paul Driot, Pierre Blanchet et René Arnoux. L’équipe se classant Vice-championne en 1988 (pilotes et equipes avec ses pilotes Olivier Grouillard et Michel Trollé) Mais, à la fin de la saison, les associés se séparent. Jean-Paul Driot crée alors, début 1989, DAMS (Driot Arnoux Motor Sport) et continue en F3000, avec un jeune pilote français, Erik Comas.

 

 

L’écurie s’installe dans les anciens locaux de l’équipe  Rondeau, près du Mans.

Jean-Paul Driot se souvient :

« Nous étions une douzaine et c’était un peu l’aventure parce que nous avions choisi directement l’échelon international de la F3000. Mais la dynamique du succès s’est enclenchée très rapidement. En 1989, nous étions vice-champions avec Comas, puis Champions avec lui en 90, avant les titres d’Olivier Panis en 93 et de Jean-Christophe Boullion en 94. »

 

 

Au fil des années, la répétition des victoires fait de DAMS une écurie de pointe en Formule 3000. Elle diversifie aussi son activité, et comme l’avait fait avant déjà auparavant le GDBA, Gilles Gaignault engageant en 1987, une Porsche 962, passant par le chemin de l’endurance et des 24 Heures du Mans, avec Panoz d’abord (1997-1998), puis Cadillac (2000-2001).

Pendant le même temps, la F3000 décline et DAMS se retire pendant deux saisons.

Pour mieux revenir avec le nouveau Championnat de GP2, lancé en 2005.

« Ma philosophie de la course n’a jamais varié », affirme Jean-Paul Driot. « Si je n’ai aucune chance de gagner, cela ne m’intéresse pas, je préfère jouer au golf ».

DAMS fonctionne sur cet axiome de base depuis le début. Mais cela n’empêche pas des heures creuses.

Les premières saisons en GP2 se concluent sur des résultats moyens, jusqu’en 2010. Année où Claire Magnant, team manager de l’équipe, propose à Romain Grosjean un plan de relance vers la F1 qu’il a quittée fin 2009.

 

 

Ce sera aussi un nouveau tournant dans l’histoire de DAMS. Le pilote français remporte le Championnat d’Auto GP avec l’équipe en 2010, puis le GP2 l’année suivante.

Une opération gagnant-gagnant : Romain retrouve un baquet de titulaire en F1 chez Lotus et DAMS une vraie crédibilité en GP2.

Elle laisse pourtant une petite cicatrice chez Jean-Paul Driot :

« J’ai vanté les qualités de Romain auprès de Gérard Lopez (le co-propriétaire de Lotus), que je connais bien et cela a pesé dans la décision de son engagement. Mais depuis, je n’ai jamais reçu un remerciement public de la part de Romain et j’en suis très déçu. »

 

 

Cette époque coïncide avec l’arrivée chez DAMS de François Sicard, au poste de directeur général, fin 2011. Compétences reconnues dans la gestion, personnalité appréciée dans le sport automobile, il est, entre autres, co-fondateur des World Series by Renault avec Jean-Paul Mari et sort d’une belle réussite avec le développement de OAK Racing, au moment où DAMS recherche un directeur.

« Sachant que le magnifique train DAMS, que j’admire depuis mes années d’étudiant et la période GDBA, s’arrêtait en gare, je ne pouvais pas le rater », explique François à propos de son entrée dans l’équipe.

Méthodique, il s’impose et impose à l’équipe une rigueur et un degré de professionnalisme supérieur.  Tout en entretenant une harmonie chère à Jean-Paul Driot.

Dès lors, les résultats suivent. Victoires et titres pleuvent : pilotes et équipes en GP2 en 2012, pilotes et équipes en FR 3.5 en 2013 et enfin le grand chelem en 2014.

 

 

Avec, en point d’orgue un autre grand chelem retentissant, à Monaco en 2014 où DAMS confisque les pole positions et les victoires sur les courses de GP2 et de FR 3.5 !

A cela, outre la bonne gestion de l’écurie, une explication, que donne François Sicard :

« Nos résultats depuis 2011 nous ont redonné un fort crédit auprès des pilotes et des managers. Ce qui nous permet d’accueillir les très bons qui font partie des filières juniors d’équipes de F1 et bénéficient donc d’un soutien financier. »

 

 

DAMS joue ainsi le rôle de grande école préparatoire pour les potentiels Champions de Formule 1. Elle a ainsi pu enrôler Kevin Magnussen – soutenu par McLaren – en 2013 (Champion de FR 3.5) et Carlos Sainz Jr – Red Bull Junior Team – en 2014 (Champion de FR 3.5).

Une situation qui se développe encore en 2015 avec Pierre Gasly (Red Bull) en GP2, Dean Stoneman (Red Bull) et Nyck de Vries (McLaren) en FR 3.5.

 

 

Sachant que le budget d’une saison de GP2 tourne autour de 3,5 millions d’€ pour deux voitures, ces apports économiques sont, en effet, primordiaux pour une structure comme DAMS.

Pour autant, François Sicard ne joue pas les matamores. Au moment d’évoquer les objectifs de l’année, il se montre même prudent :

« Dans les deux disciplines, nos pilotes seront débutants. Ils devront affronter des adversaires redoublants et redoutables, comme Vandoorne et Marciello en GP2 ou Rowland et Dillmann en FR 3.5.»

Et, il ajoute :

« Mais le manque d’expérience peut se compenser par le talent et tous nos pilotes en ont montré des quantités dans les formules où ils ont couru auparavant. »

Avant de conclure :

« Alors l’objectif sera d’abord de viser des victoires et nous ferons le point en milieu de saison. Si nous sommes dans le top trois, nous pourrons espérer une belle fin d’année. »

 

DAMS express

 

Fondée en 1989 (Driot, Arnoux, Motorsport mais depuis 1995, Driot Associés Motor Sport)

18 titres en F3000,  A1 GP, Auto GP, GP2 et FR 3.5.

Pilotes passés en F1 : Erik Comas, Éric Bernard, Olivier Panis, Jean-Christophe Boullion, Kamui Kobayashi, Jérôme D’Ambrosio, Romain Grosjean, Kevin Magnussen, Marcus Ericsson, Felipe Nasr, Carlos Sainz Jr.

 

François DAURE

Photos : Daniel DELIEN- Bernard BAKALIAN- Max MALKA- Antoine CAMBLOR – DPPI- ELF- GP2