Tous les pronostics relatifs aux résultats de cette course et plus particulièrement pour ce qui concernait les catégories GT ont été plus ou moins chamboulés par une succession d’événements ayant trait, en grande partie, aux caprices météorologiques et par conséquence aux quelques 13 interventions du safety-car qui ont quand même duré 5 h 27 ‘.
Nous avions bien conscience et l’avions écrit, que la guerre serait totale entre ASTON MARTIN, PORSCHE et FERRARI. Le match a bien eu lieu, mais alors que tout le monde criait au loup contre le méchant ogre ASTON exagérément favorisé par le règlement et la balance des équivalences, on put constater que PORSCHE, silencieux quant à ces récriminations, mais organisé comme jamais, avait bien l’intention de préparer au mieux son retour en LMP1, en se ‘retrempant’ dans une course aussi exigeante. Comme attendu, les CORVETTE n’ont pu jouer qu’en seconde division.
On n’eut guère le droit de savoir ce que la nombreuse colonie allemande avait comme stratégie et encore moins le droit de pénétrer dans les stands en catégorie GT Pro. Romain DUMAS pilote de la N° 92 nous confirmait cette forme de black out, en nous précisant même que ses parents non plus, ne pouvaient pas le voir dans le stand.
Heureusement, Jacky RAVA le manager de la PORSCHE IMSA N° 76 nous accueillait avec le sourire malgré la tension de l’enjeu de plus en plus prégnante au fil des heures.
Dans cette course folle, comme tout le monde s’accorde à penser qu’elle fut particulièrement intense en catégorie GT, tant en Pro qu’en Am, tous les pilotes déclaraient avoir vécu une course très difficile. Alors, on comprend aisément la fierté et le soulagement des équipes à l’arrivée.
EN GT Am
Juste avant que la PORSCHE IMSA N° 76 ne franchisse la ligne d’arrivée en vainqueur, Christophe BOURRET tendu mais confiant, les yeux fixés sur la pendule et les écrans de contrôle nous lâchait dans un sourire:
» C’est long, mais c’est bon et plus c’est long , plus c’est bon. J’ai du me taper en gros 2h 30 de pilotage derrière safety-car, c’est certes frustrant mais c’est aussi la Sécurité. Vous n’avez pas été sans remarquer la course fantastique de Jean- Karl, notre petit jeune a été formidable. »
Aux côtés de Christophe BOURRET, Raymond NARAC concessionnaire PORSCHE à ROUEN, qui nous disait en début d’après midi :
» On a mis le jeune VERNAY pour terminer la course et on va gagner et ça peut aider pour le commerce. En raison des intempéries c’était très difficile de ne pas faire de faute. »
Batti PREGLIASCO le manager d’AF Corse était un peu marri de ne pas avoir pu décrocher la victoire, il place néanmoins ses deux voitures N° 55 et N° 61 sur le podium et beau joueur, il nous disait dans un sourire un peu crispé:
« On est encore là et dans cette course aussi particulière et aussi difficile, ça n’est pas si mal, non ? »
Il faisait sans doute référence à la déconvenue survenue en GT Pro dont nous allons parler.
On n’oubliera pas de rappeler la sortie très brutale de l’ASTON MARTIN N° 95 avec le décès d’Allan SIMONSEN et, tout le cran des autres équipages ASTON poursuivant la course pour respecter un souhait de la famille de l’infortuné pilote.
En GT Pro
L’empoignade fut tout aussi sévère, sinon plus, dans cette catégorie. On a bien cru durant une première partie de course que les ASTON allaient imposer leur loi. Puis la « Kolossale » organisation allemande planifiée sans doute après un certain nombre d’essais et de simulations, s’est mise en marche.
On s’était interrogé sur les capacités réelles de PORSCHE à triompher au Mans après des performances un peu en retrait dans les épreuves WEC, en début de saison. La réponse est sans appel. Qu’on se le dise, PORSCHE sait gagner au Mans et GT et souhaite gagner au Mans en proto. Arrivée sur l’objectif programmée en 2014. Victoire en proto ? Quand ?
En conférence de Presse les pilotes vainqueurs apportent quelques informations intéressantes.
Marc LIEB déclare:
» Dans nos derniers choix pneumatiques lors de la dernière averse, nous avons eu un peu de chance et, il en fallait beaucoup pour terminer et gagner cette course complètement folle. »
Richard LIETZ poursuit sur le même registre:
» Cette victoire est importante pour PORSCHE, pour célébrer notamment le 50 ème anniversaire de la 911. En arrivant ici nous ne nous attendions pas à être aussi rapides. Cette victoire c’est un réel exploit. »
Romain DUMAS visiblement très heureux tient à préciser:
« Sincèrement cette course fut incroyable. Pour ma treizième participation, j’ai connu une très grosse pression de nos adversaires, les écarts n’ont jamais dépassé les 3 minutes, mais on était plutôt à 3 voitures en 1 minute. »
La seconde PORSCHE N° 91 a rejeté sur la dernière marche du podium l’ASTON MARTIN N° 97.
Le centenaire de la marque qui devait être célébré de manière grandiose, avec une victoire envisagée et à priori possible à tant en GT Pro qu’en GT Am, ressemble à une véritable déroute dont on pouvait lire les effets sur le visage défait de David RICHARDS co-propriétaire d’ASTON MARTIN.
Après les opérations officielles d’arrivée, nous avons tenu a rencontrer Raymond NARAC, le concessionnaire Porsche de Rouen, habitué des courses au Mans (neuvième participation) alors que Marc AYOUN PDG de Porsche France jubile à côté de cette équipe victorieuse.
Ecoutons le concessionaire-pilote:
» En 2007, on avait gagné et depuis cette date, on tournait autour de la victoire. Là on a fait zéro faute. Chapeau à Jean-Karl VERNAY pour sa première participation. Ce résultat devrait nous donner un bon élan pour 2014. Nous avions pas mal de pression, il nous fallait réussir. On a démontré qu’on était performant.
Il y a la voiture certes, mais toute une équipe très investie, au moins à 200%! »
Nous tentons de savoir quelle place l’usine a tenu dans cette course, sachant que nous avons croisé des ingénieurs venus de l’autre côté du Rhin.
Raymond NARAC confirme:
» La voiture c’est à 80 % IMSA et 20% usine. Effectivement, toute la partie moteur est directement gérée par l’usine. Chez nous Philippe BARRE est notre ingénieur et le sommet de la pyramide de notre organisation repose sur Jacky RAVA. »
Cette victoire française a bien sûr une forte coloration allemande et devrait permettre de voir Jean-Karl VERNAY devenir pilote officiel PORSCHE et, l’écurie accéder au rang de semi-officielle.
Une fois de plus, on a pu mesurer l’impact de l’épreuve mancelle où tous les constructeurs viennent chercher une consécration. Quand en plus les voitures gagnantes sont assimilables à des autos à vendre, le marketing se met en marche avec une force incomparable. Le Mans c’est un label, une référence et là, c’est bien PORSCHE qui a raflé la mise.
Alain MONNOT
Photo: Gilles VITRY et Gilles MOLINIER autonewsinfo