Bon, j’ai chialé.
Quand j’ai vu, en pré-grille, Christian Sarron, Manuel Herreros, Wayne Gardner, Freddie Spencer, se rapprocher pour être ensemble, se serrer la main avant d‘entrer en piste, sourire comme des gamins qui font une jolie farce, s’élancer vers la piste avec des dizaines d’autres motards totalement inconnus, quand Christian Sarron m’a adressé un salut juste avant l’ouverture de la grille façon « moi non plus je n’y crois pas », oui, j’ai chialé.
SOUVENIRS, SOUVENIRS…
Puis Gilles Vitry le photographe d’autonewsinfo, qui les attendait sur la piste, m’a rapporté des photos (ci-dessus) où Sarron lève la main pour saluer les milliers de spectateurs, dans un peloton où les titres mondiaux sont plus nombreux que les milliardaires aux Bahamas, j’ai encore retenu une larme.
Les Coupes Moto Legende ont eu lieu ce week end du 31 mai-premier juin à Dijon, avec une affluence démentielle malgré la pluie menaçante le samedi.
Qu’est ce qui pousse ces milliers de fous à affronter la route sur leurs engins qui ont l’âge de leurs grands pères, à venir s’agglutiner dans un espace où l’on a du mal à marcher tellement il y a de monde, à s’écraser autour du circuit pour voir passer tellement de motos que l’on se croirait sur le périf un soir vers 18 heures ?
Un mot.
La Magie.
MAGIE ?
Moto Légende ?
Pour donner une idée de ce que c’est à quelqu’un qui, par le plus grand des hasards, n’aurait aucune idée sur la question ?
C’est un peu comme si tu parlais cinéma à table et que Di Caprio, Chaplin, Orson Welles, Catherine Deneuve, Bertrand Blier et son père Bernard, Coppola, Claudia Cardinale, Fellini débarquaient au dîner, parlant d’eux, devenant tes amis et te proposant de t’emmener au cinéma voir leurs films préférés.
C’est impossible, c’est inimaginable quand tu n’es qu’un mec qui ne connaît personne dans la haute et qui aime juste l’atmosphère des salles obscures.
Et pourtant l’espace d’un week-end en mai, ça existe.
Il ne s’agit pas de cinéma mais de moto.
Tout ce qui se fait de plus beau dans le « classic », de plus expert, de plus aficionado, de plus performant, tout le beau monde est là, le tout entouré d’un circuit célèbre, celui de Dijon-Prenois, où roulent des milliers de motos.
Parmi ceux qui roulent, douze Champions du Monde, tous issus du carnet d’adresses et de potes de Daniel Adrian, qui, quand ils descendent de moto, te serrent la main, te parlent de leur carrière boivent un coup avec toi et ne fuient pas vers un mobil-home défendu par des vigiles à tête de molosse…
Ils te parlent même si tu n’es rien, pas journaliste, pas leur pote, pas quelqu’un qui a des relations.
C’est un miracle alors Moto Légende ?
Oui.
FLANER , HUMER, RETROUVER, FRISSONER DE BONHEUR…
Donc, on a réuni tous les pilotes pour faire une photo, on a eu du mal, ils se retrouvaient entre potes pas vus depuis des années, et ils parlaient de leurs souvenirs, ils étaient plus heureux que nous.
Voilà, une journée qui commence comme ça, je le répète, ouverte à tous, c’est forcément un grand jour pour vivre.
Oui, la moyenne d’âge est assez élevée, mais en France, on vit vieux, on aime vieux et on roule vieux.
En plus, les motos Classic sont les plus belles, et de loin, à l’époque, les constructeurs ne savaient pas ce qu’étaient ces comptables qui dessinent les autos (et quelquefois les motos…) aujourd’hui.
Elles font un bruit du tonnerre de Brest, elles fument comme des usines chinoises, on est en plein contrepied du politiquement correct et du vertement sans odeur et sans couleur, on est donc en pleine révolte et c’est bon comme du pain fait dans une vraie boulangerie.
Alors flâner au long de l’histoire, parler à des gens qui ne demandent que cela, c’est incroyablement vivant, et comme on en a encore pour un bout de temps à avoir envie de se faire plaisir, on en profite.
J’ai retrouvé Spencer, que je n’avais pas vu depuis trente ans.
Il n’a pas vraiment vieilli le héros !
On s’est souvenus que quand nous l’avions invité à Sports Dimanche Soir avec Jean Michel Leulliot, sur TF1, je lui avais demandé s’il lui arrivait de chanter sous le casque pendant les tours d’honneur, il m’avait répondu « Sing ? You french guys are really creazy ! », « Chanter ? Vous les Français vous êtes vraiment dingues »… et on s’est marrés comme des gosses…
Profiteurs, rebelles, jouisseurs, oui m’sieur !
YAMAHA OUVRE LE BAL…
Yamaha Classic Service (yamaha-classic-service.fr) est un département créé par Yamaha France et ses concessionnaires pour restaurer les motos « classic » de la marque, et c’est évidemment incroyable de voir à quel point cette marque est riche de modèles devenus cultes.
Vous pouvez les restaurer seul, auquel cas le service vous trouve les pièces et surtout vous aide de ses conseils et astuces, ou vous pouvez les faire restaurer chez les concessionnaires qui se sont impliqués dans l’idée et que vous trouverez sur le site indiqué ci-dessus.
Il y a aussi une collection patrimoine Yamaha, et Eric de Seynes, le boss de Yamaha France, avec sa délicieuse attachée de presse, Chrystelle Villard, ont prêté près de vingt de leurs motos les plus emblématiques de l’histoire de la marque à des journalistes qui sont descendus à Dijon, en deux jours, par les petites routes de France.
Eric de Seynes et Chrystelle n’auraient raté cela pour rien au monde et ont roulé avec leurs copains plumitifs…
Eric, le boss a aussi roulé sur le circuit, magnifique combinaison de cuir sur le dos, moto mythique entre les jambes.
La tradition instaurée par l’immense JCO est respectée, le tôlier roule et adore ça!
Il m’a confié avoir été très fier de rouler avec Chas Mortimer, un pilote au palmarès incroyable, vainqueur de huit TT de l’Île de Man, vainqueur du premier GP 500 remporté par Yamaha en 1972 en Espagne et de façon non accessoire, seul pilote à avoir gagné des GP dans les catégories 125,250,350,500 et 750 !
BMW “ALLES GUTE ZUM GEBURTSTAG!”
Ce qui veut dire « Bon anniversaire! »
Il est vrai que sur les routes d’arrivée au circuit, les BMW étaient innombrables, “Classic” ou modernes.
C’est que cette marque très initiatique fêtait ici, à Dijon, son quatre-vingt dixième anniversaire, avec une très belle expo de modèles devenus mythiques.
Ne pas pouvoir faire un mètre, ça, à Moto Legende, c’est… classique… mais entendre parler allemand dans tous les coins ça l’est moins.
Car en fait, cet événement est devenu tellement incontournable que l’on y vient de partout en Europe, dans cette Tour de Babel de la moto, il y a des coins anglais, des coins bataves, italiens etc…
Donc, chez les Allemands, on a retenu la R47, la première BMW importée en France, 18 cv, 110 km/h…
C’était une moto de sport qui pouvait être engagée dans les Championnats nationaux.
Vu aussi, à l’autre bout de la chaîne du temps, la moto concept Ninety, avec son guidon bas, sa selle très reculée, typique des années 60/70, qui rappele le look de la R90S, jusqu’à sa couleur Orange Daytona, la moto sportive de l’année 1973.
Vu, bien sûr, la moto d’Hubert Auriol, multiple vainqueur du Paris-Dakar, le vrai Paris-Dakar!
Enfin, une remarque, que m’a glissée Jacques Bussillet, ex red-chef de Moto Journal, et surtout l’un des experts absolus en France dans tout ce qui est moto sportive depuis les origines, on trouvait sur le stand la GS, bien sûr, phare actuel de la marque, et la moto « Ecureuil » engagée au Dakar en 1986, dessinée par Joël Guilet et fabriquée à l’initiative du journaliste Pierre Marie Poli.
Et bien, le truc incroyable, c’est que le nez de la GS est exactement celui de l’Ecureuil.
Guiletavait donc juste trente ans d’avance sur les designers de BMW….
Cette moto Ecureuil d’ailleurs, était vraiment incroyable.
Elle se démontait en deux parties, partie cycle avant et arrière et le moteur devenait totalement accessible, ceci juste en défaisant deux boulons !
Enfin, création perso de Pierre marie Poli, la boussole solaire, fixée sur le réservoir, permettant de donner le cap en fonction de la position du soleil et de l’heure de la journée, une sorte de cadran solaire adapté au Rallye Raid…
Bon, on a vu des tas de motos aussi uniques les une que les autres, restaurées avec amour et dextérité de bijoutier et roulant sur le circuit et pas du tout au ralenti !
C’est ce que m’a dit mon ami Didier Coste, avec qui je bossais il ya trente ans à Moto Verte (mais lui a réussi !) il est passionné de motos anciennes et vient bien entendu rouler à Dijon. « Incroyable comment les mecs envoient ! »
LA MOTO DU PRAIZE…
Un petit stand, où un collectionneur passionné montrait des bijoux…
Alain Guillon présentait une moto plus que culte.
La Pernod 250 qui a gagné le GP d’Angleterre en 1983 à Silverstone en 250cc, pilotée par Jacques Bolle, qui est aujourd’hui, … le Président de la FFM.
Il faut se souvenir que cette victoire, dans un des temples de la moto de vitesse, par un pilote Français, un pays où les Champions et même les vainqueurs de GP ne sont pas légion, avait été un boum incroyable dans le monde entier !
Vu aussi la moto BUT-SMAC 375 d’Eric Offenstadt, un pilote et un créateur visionnaire qui a lancé pleins de trucs aujourd’hui évidents contre l’avis des ingénieurs de l’époque. I
Il est d’ailleurs en ce moment sur un projet de moto de GP totalement révolutionnaire.
En 1978, avec l’aide de Gilles Pernet, journaliste à l’Equipe, avait été créée cette moto BUT.
La SMAC était la boîte d’Eric qui vendait des pièces de compétition.
Cette machine futuriste à cadre monocoque en aluminium, suspensions avant à roue tirée en magnésium à flexibilité variable et anti-plongée réglable, était un concentré des recherches d’Éric Offenstadt.
DES POTES…
Rencontré Laurent Gomis, pilote surdoué des années 70, qui a monté une entreprise de réinsertion sociale à la Goutte d’Or, quartier défavorisé de Paris, qui a aussi une maison adorable dans le plus beau coin de la Bretagne Nord et vient d’y rouvrir le café fermé depuis des années, on sait que dans un village, la disparition des services publics, des commerces et du café sont synonymes de mort sociale collective.
Bref, l’endroit revit, encore de la magie.
Le café s’appelle Ar Vag, c’est place de l’Eglise à Plougrescant et bien sûr, on y organise des concerts.
C’est au nord de Treguier. (Tel 02 96 92 61 19).
Bien entendu, il roule toujours sur des motos anciennes, et il est venu limer le bitume de Dijon Prenois !
Retrouvé aussi Bernard Fau, pilote adorant courir en Angleterre dans les années 70, contre des calibres (Read, Sheene, Agostini, Bonera, Roberts, Lansivuori, Duhamel, Braun, Pons…) et qui a un projet formidable, un film qui s’appellera « Il était une Fois Continental Circus » qui rappelle bien sûr le film culte de 1970 de Jérôme Laperrousaz.
Rencontré aussi Steve Tonkin, un anglais qui propose une Replica absolument phénoménale de la Norton Manx, au prix de 26 000 £, soit un coup à 40 000 euro, c’est de la folie mais la moto est absolument sublime. Et elle se vend bien !
Elle s’appelait International Racing Model et est devenue Manx après ses nombreux succès au TT de l’Île de Man.
Cette Norton Manx était donc une pure moto de circuit et aujourd’hui, celle-ci est street legal, c’est-à-dire qu’il est possible de l’immatriculer.
Tel: 00 44 (0)1 524 825 205
Unique ?
Comme toutes nos rencontres de Moto Legende!
Gilles Gaignault vous décrit quelques autres retrouvailles sympas.
La principale étant de retrouver Fredie Sheene !
Frédie n’étant autre que le fils de notre pote, grand copain des pilotes et journalistes Français, l’immense Barry Sheene. Barry fut double CHAMPION du monde dans la catégorie Reine, celle des 500cc. Avec le Team Suzuki
Barry était un SEIGNEUR, un fantastique pilote et un mec absolument génial.
Il adorait venir courir en France où il se déplaçait au volant de sa ROLLS immatriculée 100 BSR (Barry Sheene Racing) accompagné de sa fiancée, la sublime Stéphanie, laquelle allait plus tard devenir Madame Sheene et donc la maman de Fredie
Barry nous a quitté il y a dix ans – autonewsinfo lui a consacré un sujet souvenir, tout récemment, le jour de ce dixième anniversaire, le (voir lien) http://www.autonewsinfo.com/2013/03/10/moto-barry-sheene-10-ans-deja-71818.html
Barry était notre ami et apré&s sa carriére, il était parti s’installer et vivre aux antipodes dans la lointaine Australie, pays qu’il adorait.
Et, après l’avoir croisé sur tous les circuits du monde, a commencer par les Anglais de Mallory Park, de Snetterton, d’Oulton Park, voire de Sraborough ou de Thruxton sans oublier Brands Hatch et Caldwell.
Mais aussi à Daytona, Laguna Seca ou Ontario aux USA
Sans oublier les pistes Françaises dont il raffolait comme Rouen Les Essarts ou Magny cours, nous le retrouvions chaque année, en fin de saison, à l’occasion du Grand Prix d’Australie, à Adélaïde où Barry commentait le GP pour une chaîne de TV Australienne.
Freddie vit en Australie à Gold Coast et naturellement adore la moto. Mais il n’est pas pilote à plein temps. Il roule de temps en temps mais exerce le job de mécanicien sur … motos évidemment
Après les signatures, l’album photo souvenirs…
Jean Louis BERNARDELLI et Gilles GAIGNAULT
Photos : GILLES VITRY et BRUNO LAURENT
L’ALBUM PHOTO DE GILLES VITRY