RALLYE NEIGE ET GLACE : LE DOUBS… DUR !

C’est la vraie première journée du Rallye Neige et Glace, qui se déroule dans le Jura et le Haut Doubs.

Une journée techniquement difficile, esthétiquement absolue, sportivement aussi riche que cruelle…

LE MATIN DES MAGICIENS…

« Moins trente chez moi cette nuit » me disent quelques adorables personnes qui habitent la montagne au dessus du parc fermé, face à l’Hôtel du Lac, sis à Malbuisson.

Moins 25, au moment où l’on démarre les moteurs.

En contrebas, le lac de Saint Point fume comme l’Etna, tentant de contrer le gel imparable…

Du côté des autos du Rallye, c’est le moins que l’on puisse dire, ça peine…

Les voitures modernes ne sont pas forcément à la fête non plus parce que certains composants du gas-oil détestent le grand froid.

Et dans ce genre de situation, on apprend comment la sagesse populaire pallie le je-m’en-foutisme de pétroliers qui vendent le même produit à Marseille en juillet et ici en février…

Pour un réservoir de gas-oil, ajouter deux ou trois litres de super.

Et toujours avoir le plein, ce qui diminue le risque de givre dans le réservoir.

Bon, après ce cours magistral de résistance aux éléments, le bon côté des choses.

Quand il fait très froid ici, c’est que le ciel est dégagé.

Les couleurs et les contrastes de couleur sont alors  inoubliables, même des Michel Ange ou des  Magritte n’ont pas imaginé et encore moins trouvé ou créé ces teintes du ciel variant du bleu infini au rose total en passant par l’orange et le jaune d’or, le vert sombre des épicéas qui courbent l’échine sous des tonnes de neige, le blanc insensé des prés qui sont aveuglants tellement ils brillent au soleil…

Voilà le tableau du matin.

Une autre tempête de ciel bleu !

 LE JOUR LE PLUS LONG…

335 kilomètres au menu…

Il ya des tas de gens qui font ça chaque jour… mais pas forcément sur des chemins de forêt glacés qui ne savent pas la signification des mots « ligne droite », des routes perdues (et sublimes) où l’on se dit parfois qu’à part le mec qui a construit la route, personne n’est plus jamais venu ici…

Patrick Zaniroli, est finalement plus fort que Livingstone, les sources du Nil à côté du Nirvana jurasso-doubiste, qu’est le Rallye Neige et Glace, c’était de la petite bière !

Une neige comme ça, on en trouve à de rares occasions dans sa vie. Dure, lisse, formant parfois même une sorte de tôle ondulée là où les autos passent vite, totalement immaculée…

Je découvre un autre talent chez Zani.

Son fils, Tom.

J’aurais dû le détester, il fait le même métier que moi, ce qui est en soi insupportable, en plus il est jeune, ce qui est une maladie incroyable, elle ne fait souffrir que les gens autour…

Et en plus, Tom conduit comme moi et probablement en mieux !

Et sur de la neige dure comme du béton et lisse comme un miroir, filer sa vie à un mec quel qu’il soit est souvent difficile… Bon, au bout de deux cent mètres de neige, j’ai commencé à admirer.

Et un mec qui sait conduire, c’est rarissime et c’est, en  ce qui me concerne, un petit bonheur.

Voilà lecteur, tu vois, il ya des jours où l’on pourrait croire que les saloperies du monde autour sont, un instant seulement, oubliables. Justement, retour au monde cruel…

Chemins étroits, piégeux aussi. Et alors, la neige miraculeuse peut devenir traitresse, voire perverse… Le double vainqueur de l’épreuve, l’équipage belge Deflandre-Gully, a perdu et détruit sa belle Alfa Giulia Sprint jaune… d

Juste après la dernière section chronométrée du jour…

« Je n’ai toujours pas compris » explique Yves Deflandre

Et, il enchaine:

« je suis un peu trop à la corde, je reviens vers le centre de la route et là, tout doucement, on va se poser sur le talus en face… Pendant une seconde l’auto se demande si elle y va où elle n’y va pas, et… elle y va, en tonneaux lents…   L’arceau de sécurité nous sauvé la vie et tout le reste, pas une égratignure. Mais la voiture… On est bons pour trouver une nouvelle caisse… Ce qui me fait le plus rager, c’est que c’est beau, c’est superbe partout, des conditions exceptionnelles, exactement ce que nous sommes venus chercher ici, de la glisse et du mystère »…  

 

Autre incident, moins grave quand même, sur la superbe Peugeot 504 V6 Coupé GR4 de Jean Conreau…qui est ce lundi soir  un peu chiffon. Jean a voulu laisser passer un concurrent attardé qui cravachait pour remonter, il s’est donc rangé sur le côté. Bilan, il tape à l’avant… mais en plus, son dépasseur ne peut l’éviter et lui met un violent coup à l’arrière !

Il ya quand même des moments à la con, même enre gentlemen… Bien sûr, les deux autos continuent.

Plus dangereux…

A une intersection, une auto se goure de branche. Deux kilomètres plus haut, le navigateur se rend compte de son erreur. Demi-tour et on revient vers l’embranchement, à la vitesse d’un missile énervé…

Et arrive en face, une autre auto qui s’est également trompé à la « jonction ».

Boom…

 

PESCAROLO ET THIRIONET

Enfin, il est arrivé un truc étonnant à Pesca, qui a un vrai don de conteur, c’est une partie de son charme.

« Tout marche bien » dit Henri, qui ajoute:

« Mon copi, Yves Thirionet me fait une nav aux petits oignons, au mètre près, bon des fois c’est plus que ça et notre Porsche ne demande qu’à envoyer du lourd pour rattraper le temps perdu, mais c’est une auto de série avec rien pour tenir les instruments… Et bien sûr, on ne fait pas de trous dans une belle auto prêtée par un ami ! Donc ça tient comme ça peut…   Et soudain le cadenceur, c’est tout petit mais c’est vital, c’est lui qui te dit au mètre près si tu es en avance ou en retard sur ton temps idéal, se fait la malle et passe sous le siège droit ! Yves farfouille un paquet de minutes, pendant ce temps je n’ai plus d’indications, il n’arrive pas à le trouver et me demande de filer un coup de frein pour le faire revenir vers l’avant de l’auto ! Voilà comment on prend des pénalités parc que bien sûr, à ce moment là, il ya un contrôle secret qui a enregistré que tu es dans les choux… »

Bon, Henri est quand même, dix-septième au classement de cette journée.

STOP !

Dans un rallye de régularité, on déjeune.

Et donc on s’arrête, en général dans un endroit champêtre et bucolique à souhait… ou on gueuletonne !

Ce lundi, c’est la Ferme de Grosbois, à Soulce-Cernay.

Pour les fans, l’endroit est sur Google Earth…

Pour les bons vivants, c’est près de Morteau et Montbéliard, endroits où l’on sait ce que veut dire bien bouffer…

Un endroit fabuleusement authentique, avec un menu d’hiver magnifique, servi par des gens qui sont des crèmes.

C’est marrant, on se dit toujours que les habitants d’un endroit ressemblent à leur terre, c’est tellement exact ici !

Ce sont eux les magiciens du conte de fées très réel qui s déroule dans la région.

[email protected], Tel 03-81 96 47 40.

La spéciale suivante … part du gîte !

Liaison zéro mètre ! Un vrai fantasme…

Quelques heures plus tard, après avoir rugi dans la forêt qui assourdit tout bruit, les 80 autos (un peu moins, on a vu pourquoi…) arrivent au terme de la journée.

Encore une trouvaille de maître Zani.

Un magnifique circuit de kart, un peu « in the middle of nowhere » (paroles de la chanson titre de Bagdad Café), décor totalement naturel, ambiance surnaturelle, public nombreux sorti de… loin, forcément, Radio Bleue, qui patronne l’évènement, a bien fait son boulot…

Zani, adonc d’abord formé une couche de neige à sa façon, on a écrit hier comment il protège l’enneigement de ses spéciales, d’abord la « lame » pour dégager, puis on tasse…

Enfin, à toute petite vitesse, un camion-citerne a arrosé la pré-couche ainsi formée, ce qui est exactement la façon de procéder pour faire une patinoire…C’en est une !

Chacun a droit à cinq tours de manège…

Mais rouler sur une patinoire avec seulement cent clous par roue, c’est  de la dentelle qui peut vite tourner au cauchemar !

Bon, chacun d’entre nous, selon ses fantasmes, a attendu l’image qu’il avait envie de voir.

Je vous bassine assez avec mes obsessions Berlinette Alpino- Austin Cooperesques, entre la bagnole qui n’est jamais en ligne droite, il est connu que sur une berlinette, on regarde la route par les fenêtres, et le kart avec une carrosserie dessus, il y avait de quoi se régaler.

Il ya eu tout ça et j’ai bu du petit lait…

Et puis c’est comme les Tontons Flingueurs… y’en a…

Des Porschistes qui comprennent comment ça marche au bout de deux tours, y en a ! (Lionel Hansen).

Des mecs qui écrivent à plusieurs reprises leur nom sur la glace, y’en a.

De très grands noms de l’endurance que tout le monde est venu voir rouler, y ‘en a.

(Il n’a écrit qu’un seule des lettres de son nom, un très bel « O ». Pour le reste, pilotes ou spectateurs, on a regardé ce qu’est le talent). Et puis il ya le mec qui laisse tout le monde sur le c…

Le grand Lucien Guitteny (Team Anjou) est arrivé au volant de sa Simca P60 de 1960 de soixante chevaux…

Pas seul d’ailleurs, ses deux fils courent aussi ce Rallye Neige et Glace, l’un en Alfa, l’autre en BMW.

Lucien s’est engagé sur le circuit et… est devenu finlandais.

Sa P60 Montlhéry est devenue la Cooper de Makkinen, son train avant, est un rail placé au millimètre près et l’arrière balaie comme un ballet.

Bon, il est spécialiste des circuits de glace, il a aussi couru au Mans, on sait qu’il est bon.

Après le passage divin de Pescarolo, Lucien a été le (Grand !) Petit Prince de cette journée…

Je garde le petit secret pour la fin de la séance. Sur ce circuit, quand il est en version « été », viennent rouler, en kart, pour le plaisir, de très grands noms.

Ils habitent tout près, disons de l’autre côté de la frontière helvète.

L’un est Français, quatre fois Champion du Monde de F1.

L’autre est Allemand, sept fois Champion du Monde de la même discipline.

C’est dire à quel point ce Circuit de l’Enclos est un paradis…

C’est à côté de Septfontaines, pas très loin de Pontarlier.

Location de kart possible, bien entendu.

www.circuitelenclos.com Tel 03 81 49 55 44

LES BELGES IMBATTABLES…

VAN DE WAUVER ET PAISSE

On a dit le malheur de l’auto No 1. Pourtant, étant sorti de la route après le dernier contrôle, cet équipage est encore en seconde position du classement.

Élégante façon de sortir de scène !

Le leader est l’équipage Jean Pierre VandeWauwer-Joseph Baisse, sur la Porsche 914/6 GT No 8.

Il y a un seul secret me dit le pilote.

La mise au point.

« Tu peux avoir nonante chevaux de plus que l’autre, ça ne sert à rien si ton auto est mal réglée. Moi, mon secret, c’est que je règle tout, hauteur de caisse, moteur, suspensions, tu peux t’offrir aussi des amortisseurs à 10 000 euros et ne rien faire avec alors qu’un truc qui vaut dix fois moins est facile à régler… ».

C’est donc un magicien, un autre, qui finit ce reportage.

De ces très rares ultra-talents qui savent régler une auto et qui donc font gagner leurs écuries et leurs pilotes.

J’en connaissais un, Philippe Marcello, qui a bossé avec Pesca d’ailleurs.

J’en connais maintenant  un deuxième.

Une journée où l’on rencontre un vrai sorcier de l’automobile est une belle journée…

Jean Louis BERNARDELLI

Photos :  Tom ZANIROLI et  Richard BORD

 

Le podium:  

Vandewauwer/Paise (Porsche 914/6 n°8) qui a dominé la première étape avec, notamment 3 arrivées au zéro parfait. Avec 212 pts, ils devancent leurs compatriotes Van Rompuy/Vermant (Opel Ascona n°3), l’Opel GT1900 n° 82 de Doyen/Torrejon et l’Opel Kadett n°52 de Lausberg/Pirotte.

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