11eme GRAND PRIX DE LA VILLE DE TOURS: FOCUS SUR ROLLAND-PILAIN

La Ville de Tours cultive  le  goût de la tradition et de la fête populaire.

La foire à l’ail  pour la Saint Anne, l’arrivée du Paris-Tours ou la commémoration  du Grand Prix de l’Automobile Club de France, font partie de ces  grands événements  qui attirent une  foule considérable.

Cette année,  la 11ème édition de  cette « réplique » du Grand Prix de Tours  en 1923, a modifié ses habitudes quant au tracé  en raison  des travaux du tramway , mais n’a pas failli à son succès attirant durant  trois  jours des  curieux, des passionnés, des  collectionneurs lors  des  diverses  animations, largement  ouvertes  au  grand public.

Il faut dire qu’il y en avait  pour  tous  les  goûts  entre : la concentration internationale, le concours d’élégance, les expositions, le rallye  touristique  à travers  le département, les baptêmes, les démonstrations , les  ventes aux enchères et que  le plateau , fort relevé,  avait de quoi séduire.

Autonewsinfo a choisi  pour l’occasion  de  mettre en lumière la marque tourangelle Rolland-Pilain, très  présente pour l’occasion, comme le confirme Claude Poussif vice-président local  de  l’association des amis de Rolland-Pilain :

« Certes, comme vous  le savez,  sont  présents  de  nombreux   propriétaires tourangeaux, mais  nous avons  une  belle participation internationale  et le Musée Henri Malatre de La Rochetaillée à Lyon, nous a prêté  pour la  circonstance,  la superbe  A 22 GP de 1923 !  Nous présentons  ainsi une  quinzaine de  véhicules,  tous dans un état exceptionnel.»


Dans  les allées  du parc de la Perraudière à Saint Cyr sur Loire où arrivent  les  concurrents du rallye  touristique, nous admirons effectivement  toute  une série de Torpédo des  années  1921-1925,  mais aussi la B25 Grand sport,  ou le  fleuron de la marque : la  très luxueuse C23 de 1925.

Alors, il est  temps  de  vous  conter  l’histoire de la  rencontre  de  deux trajectoires d’hommes qui  ont créé une marque  automobile  en associant  leurs  noms , leurs compétences et  leurs talents.

François Rolland riche commerçant local souhaite s’investir  dans  la construction automobile. Il rencontre Emile Pilain mécanicien inspiré en 1906.

Leur sort est vite scellé. De la Rue Victor Hugo à Tours  sortent  les  premiers  modèles Type A d’abord  puis B d’une  puissance maximum de 45 cv, grâce au génie mécanique de ce sorcier de Pilain qui s’affranchit des ensembles propulseurs disponibles pour créer  ses propres moteurs.

Juste avant la guerre de 1914, l’usine  migre  vers la Place Rabelais. Le fils Rolland, Lucien, va relayer son père  alors  que le frère Léon, rejoint Emile Pilain.

Après la guerre,  les développements techniques prennent  une  belle  dimension  dans  cette  entreprise qui fabrique directement ses châssis et ses  moteurs et sous-traite  ses carrosseries.

En 1923, on atteint  les sommets de la  gloire avec  la sortie de la C23 très  appréciée du  point de  vue de la ligne  mais aussi  pour ses caractéristiques techniques en pointe. La marque  est délibérément innovante et  tournée  vers  les exploits sportifs.

Ne lui doit-on pas  les premiers freins hydrauliques et  ne  voit-on  pas  sur  ses  moteurs  de  compétition, les arbres  à cames en tête notamment sur le  très  beau 8 cylindres en ligne de l’A 22 GP qui, faute de terminer le Grand Prix de Tours  en 1923, trusta  les deux premières  places,  peu de  temps après,  lors  du GP de San Sébastian.?

Les nombreuses participations à des  compétitions (24 Heures du Mans 1925, Monte Carlo 1927), les records (104 km/h de moyenne sur 24 h à Montlhéry en 1924) les raids  (première traversée de l’Afrique d’Est en ouest en 1924-1925), apportent  une  notoriété certaine  à la marque, mais creusent  ses  finances.

Parallèlement, les  firmes comme Citroën, Peugeot et Renault construisent  les véhicules en série , et de ce fait,  dressent  alors contre la marque aux trois tours, une concurrence tellement farouche,  que Rolland-Pilain rend les armes finalement en 1932, après avoir  produit tout de même plus de 5000 véhicules.

En revivant le parcours de cette  marque trop éphémère, on comprend  bien  pourquoi des  passionnés  comme Gilles  Blanchet et Claude Rouxel aient consacré  un ouvrage « Rolland-Pilain : La voiture des As, l’As des  voitures » et constitué  cette association des amis de Rolland-Pilain  pour  perpétuer ,en terre  tourangelle notamment, cette aventure automobile géniale.

Dans  les allées  du  parc où la très belle brochette de  voitures de  prestige s’offre aux regards curieux et aux objectifs inquisiteurs, on n’est  pas surpris d’entendre  le public nombreux s’étonner  tout  haut de la beauté des  lignes de la C23 par exemple, ou de souhaiter  pouvoir entendre  vrombir le  superbe moteur de l’A22 GP. Les Rolland Pilain  jouent  les stars locales  et c’est  bien normal.

Des vrombissements, il y en aura eu  tout  le dimanche  et  près   de 20 000 personnes auront bravé la chaleur et les difficultés de circulation et de stationnement, pour  assister aux démonstrations ou animations- dans  une atmosphère  bon enfant- des quelques 500 voitures, dont l’histoire de chacune, éveille en  nous un souvenir, une envie, une émotion.

Sans chauvinisme aucun, nous comprenons  pourquoi la Ville de Tours encourage de telles manifestations qui réunissent des passionnés des  deux  côtés de la barrière. Pour preuve  cet équipage d’une Panhard 24 BT auquel je demandais si le rallye  leur avait  plu et dont le  pilote ayant vérifié  que « je m’y connaissais un peu » m’entreprit pour m’expliquer :

« Ma  voiture est  bien  une 24 BT  et  la différence est sensible  avec  une 24 CT. D’abord  au  niveau  du collecteur d’échappement avec  un tout alu sur  la mienne, mais aussi avec  une largeur de glace  arrière supérieure  de 35 centimètres, ce  qui  change  considérablement  l’habitabilité arrière… »

Des  échanges  de  ce  genre auront eu lieu  par  milliers  au cours du week-end.

La Touraine aura offert ses charmes aux  heureux propriétaires de  ces machines ensorceleuses. Les tourangeaux auront communié avec un patrimoine culturel  précieux et  apprécié.

La marque Rolland-Pilain aura souligné un particularisme local fort et pourtant assez méconnu. ..

Et pendant ce  temps  là,  juste au pied  de la superbe vitrine historique bruyante et  pimpante, coule la Loire alanguie…

Elle aussi  aurait  bien des  histoires  à  nous  conter !

Toutes celles  notamment dont  les échos  lui sont parvenus au long du week-end et qui émanent des fanatiques  des  belles anglaises, des amoureux  des Bugatti, des  inconditionnels d’Amilcar, De Dion-Bouton, Delage, Mathis, Hotchkiss, des fidèles à Panhard et  bien  entendu  des défenseurs ardents  de Rolland-Pilain, comme nous.

Texte et Photos : Alain Monnot

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