24 HEURES DU MANS: REGARDS CROISES SUR CES 24 HEURES AVEC JEAN-CLAUDE ANDRUET

Nous avions très envie pour vous lecteurs d’autonewsinfo, d’éclairer notre vision de la course par un regard extérieur issu du monde automobile.

Jean Claude Andruet, commentateur pour cette 79ème édition de la course mancelle auprès de nos confrères de ‘’France Bleu Maine’’, a bien voulu accepter juste avant l’arrivée de tenir ce rôle de « grand témoin » et nous l’en remercions bien vivement.

Pour les plus jeunes lecteurs, il convient sans doute de présenter un peu ‘’LE’’ personnage, alors que les autres se plairont à retrouver un pilote ‘’hors pair’’, éclectique et attachant.

Pour le rallye, Jean-Claude notre ami, jalonna la période de 1968 à 1982 avec des participations, des titres et des victoires à la pelle – en veux-tu, en voilà – dont nous extrairons le Monte Carlo sur Berlinette Alpine Renault en 1973, les trois Tours de Corse sur Berlinette encore et également sur Lancia Stratos.

Mais aussi ses trois Tours de France sur Ferrari.

Pour ce qui nous concerne aujourd’hui, le rallyman était particulièrement attaché à courir les 24 heures, qu’on en juge plutôt.

Entre 1967 et 1989, ce ne fut pas moins de vingt participations et à nouveau… trois titres de gloire :

Vainqueur en 1972 en catégorie GTS sur Ferrari GTB/4 avec notre autre ami, le regretté Claude Ballot-Léna

Vainqueur en 1981 en catégorie IMSA sur Ferrari 512 BB, encore avec Claude Ballot-Léna

Vainqueur en 1989 du Groupe C2 sur Courage C 20 avec Philippe Fargeon et Shungi Kasuya

Pour compléter le tableau, nous n’aurions garde d’oublier de signaler le retour gagnant effectué en VHC (Véhicules historiques de compétition) en 2007 en Corse sur la Porsche de l’écurie TCM de Philippe Peauger.

Ce bref résumé ne reflète pas la passion, la fougue, le caractère entier, le talent pur, la diabolique adresse, le sens de l’équilibre sur les surfaces glissantes…, autant de facettes d’un fou d’automobile, au point d’avoir crée en guise de retraite, une société pour la construction de véhicules électriques, principalement destiné au Golf !

Mais revenons à la course de ces 24 Heures 2011, que d’entrée de jeu, Jean-Claude qualifie… d’exceptionnelle.

Écoutons-le plutôt :

« Oui, tu vois cette course est réellement exceptionnelle. Exceptionnelle du fait de regrouper autant de voitures dans toutes les catégories. Exceptionnelle avec des écarts aussi faibles à l’arrivée. Exceptionnelle par l’intensité de la lutte et des bagarres à tous les niveaux. Exceptionnelle enfin par le nombre d’abandons qui démontre combien chaque équipage a conduit au maximum des possibilités de sa machine. »

Nous lui suggérons que nous pourrions ajouter aussi le caractère exceptionnel du nombre d’interventions de la voiture de sécurité (huit en tout), avec les incidences non négligeables sur la stratégie de course de certains teams.

Il en convient aisément puis enchaîne :

« Tu as bien remarqué qu’AUDI était légèrement plus rapide que Peugeot et que la 908 était un poil plus économe que la R18. Cela était perceptible lors de la résistance de Bourdais mais tout pourrait encore changer … avec des écarts aussi minimes et la pluie débutante, il ne faut pas faire une erreur de pneumatiques. »

Nous lui demandons :

‘’Avec ton expérience, quelle était en début de course, ton pronostic pour la victoire finale ?’’

« Tu sais, si ce n’est un feeling particulier avec une marque, il est impossible de se prononcer. Tu vois bien comment cela va se finir avec très certainement un écart en dessous de la minute après 24 heures de course ! Mais je pense aussi que depuis que cette sacro-sainte informatique est arrivée pour régner en maitresse absolue, les staffs se sont trouvés comme des cons. Ils sont devenus dépendants et en dehors du fait que ça détruit l’ambiance humaine, quand une donnée imprévue est à paramétrer dans le système, entre temps les choses ne se sont pas déroulées comme attendu. »

Notre Jean-Claude retrouve toute sa fougue et son anti conformisme.

Il fustige un monde déshumanisé, des pilotes d’un égoïsme forcené et d’un comportement qui frise l’inconscience.

Pour notre part nous souhaitons orienter nos échanges sur ce que nous considérons comme une erreur stratégique de Peugeot, quand assez rapidement Le Lion s’est retrouvé avec trois voitures usine face à une seule Audi.

Nous avons toujours pensé qu’il fallait à ce moment crucial forcer la cadence avec un équipage pour mettre une forte pression sur la voiture rescapée.

Or, nous avons eu le sentiment en regardant les chronos que Peugeot, du moins dans la nuit, ne donnait pas vraiment la chasse.

Il fallut réellement attendre le petit matin pour tenter d’inverser la situation, en comptant sans doute sur son avantage du point de vue consommation et en tenant compte des simulations des ordinateurs !

Mais, on l’a constaté au fil des heures et des relais, il était déjà trop tard…

Reprendre 4 à 5 dixièmes par tour pendant 12 heures pouvait rapporter plus que gagner 1 seconde (difficile à reprendre) durant 4 ou 5 heures.

Cela aurait pu avoir en plus un effet psychologique sur l’équipe AUDI sans doute peu disposée à tout perdre après les deux disparitions déjà enregistrée.

En endurance ces paramètres là, compte et la déstabilisation ne peut intervenir que juste après avoir encaissé un choc aussi fort que deux voitures hors jeu.

Jean-Claude persiste dans son analyse et nous répond :

« Je ne suis pas certain que Peugeot avait les moyens de partir à la chasse. Toute leur stratégie s’appuyait sans doute sur leur moindre consommation. Audi maitrise remarquablement la situation et je pense également que leurs choix de gommes Michelin sont un peu plus opérants…»

Bien vu, l’expert !

Audi a effectivement dominé de peu certes et toutes les arguties développées après la course comme la gestion des voitures de sécurité défavorable à Peugeot, ne seront au niveau de l’histoire de la course, que l’écume des choses.

Les faits sont têtus et implacables :

Peugeot a de nouveau été battu.

L’an dernier, c’était du ‘’trois –zéro’’. Cette année, ‘’du un-zéro’’.

On progresse certes, mais l’échec dans la plus grande course d’endurance au monde est patent.

Peugeot en 2010 et 2011 a remporté toutes les courses y compris avec sa 908 ‘’ privée ‘’ confiée à Oreca.

Toutes (Spa à deux reprises-Silverstone-Portimao-Petit Le Mans- Sebring)

Toutes donc sauf… Le Mans !!!

Le Mans, la ‘’ SEULE ‘’ exploitable en terme d’image, de marketing et de pub

Difficile à comprendre et à admettre…

Même si la firme de Sochaux communique sur la fiabilité de ses trois voitures à l’arrivée – plus la 908 Peugeot-ORECA – nous pensons que la gestion globale du team est loin d’être optimale.

Nous nous en étions déjà émus lors de l’épreuve de SPA, où faute d’une possibilité d’un tour clair et d’un drapeau rouge inopportun, chez Peugeot, on avait raté la séance qualificative pour la voiture de Montagny.

Laquelle n’était même pas sortie des stands !!!

Bien des choses sont donc à revoir dans le ‘’système Peugeot’’ car deux échecs consécutifs, cela fait désordre, tant il semblerait que l’on soit dans l’incapacité de maitriser tous les paramètres en même temps.

L’an dernier, c’était ‘’la claque’’ imposée par la casse des moteurs et ce parce que le staff technique avait …tout chamboulé et ce à quelques jours de l’épreuve!!!

Décision incompréhensible pour une équipe qui à longueur d’année, aligne les tests ‘’ à blanc ‘’ de 24 à 30 heures sur le circuit Provençal du Paul Ricard sans compter les heures de roulage à Motorland en Espagne et à Monza !!!!!!!

A quoi bon, si c’est pour revoir complètement les moteurs, à la veille de l’échéance.

Comprenne qui pourra !

Nous, nous n’avons toujours pas digéré les ‘’ explications bidons’’ fournis par le Directeur technique, aprés le désastre de 2010

Cette année, on va nous dire que… c’est la faute des voitures de sécurité !

Mais l’an prochain, la marque Peugeot, sera-t-elle encore officiellement présente aux 24 heures ?

A force de communiquer sur cet événement phare et de rater la cible, tous les arguments avancés, vont bientôt être contre productifs.

Avenue de la Grande Armée, je suis sûr qu’on est pas loin de penser comme nous, même si comme le disait ce grand Champion Andruet, ce fut une course EXCEPTIONNELLE.

Mais pour la seconde année consécutive, les Lionnes ont trouvées plus fort qu’elles.

Malgré la meute des quatre 908, l’unique Audi R18, les a terrassées !!!

Chez Peugeot mes amis, il y a du boulot…

Texte : Alain Monnot

Photos : Thierry Coulibaly-Patrick Martinoli- Jean Jacques Mancel (Magazine Berlinette)

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