Le mythe des 24 heures n’a rien d’usurpé et avec les performances sans cesse accrues des voitures, il est évident que dans toutes les écuries les paramètres physiques sont pris en compte avec le plus grand sérieux. Pour les lecteurs d’Autonewsinfo nous avons voulu percer « les secrets maison »en la matière, tant chez BMW Motorsport que chez OAK Racing.
Les six pilotes des BMW 55 et 56 engagées en LM GTE (catégorie pilotes professionnels) suivent toute l’année un programme de préparation physique et de suivi médical conçu et coordonné par le Docteur Karl Schuster. Ce médecin,en association avec son confrère Matthias Hotzel travaille sur ce sujet depuis plus de vingt ans.
Une des premières collaborations avec le monde l’endurance fut établie avec Peter Sauber et les pilotes français Schlesser, Jabouille ou Cudini qui bénéficièrent de cette approche novatrice,à l’époque. Maintenant, toute l’année et par contrat, le cabinet (à découvrir sur www. rennartz.de), travaille au profit de BMW mais aussi de Maserati ou encore Ferrari .
Au niveau de la saison complète de course les pilotes BMW Motorsport, qui ont subi des examens très complets (vue, réflexes, sang, masse musculaire, capacité respiratoire…), se voient prescrire un programme nutritionnel ainsi qu’une trame de travail fitness. On nous confie avec un brin de mystère :
« Pour une meilleure réactivité et coordination du corps et des yeux, nous avons mis au point une préparation très particulière inspirée par les techniques investiguées par les astronautes. »
Nous n’en saurons pas plus !
A partir de là et avec trois ou quatre visites de suivi dans l’année, une prise en charge spécifique intervient une semaine avant la course. Boisson avec des sels minéraux, traitement particulier pour les épreuves nocturnes comme au Mans (vitamine A avec du Taxofit et Difrarel pour la améliorer la vision) intervention des masseurs pour préparer les muscles des jambes et du dos, et le départ de la course peut intervenir sans aucune difficulté.
Andy PRIAULX qui a tapé assez fort lors des essais a récupéré sans difficulté nous précise le Docteur Schuster, mais il a fallu aider les mécaniciens à « digérer » une très forte dose de travail supplémentaire pour la reconstruction de la voiture !
Durant l’épreuve, le médecin reste à l’écoute de tous et laisse les masseurs Axel Kilders et Sabrina Birbaum, gérer la récupération entre les relais, mais demeure omniprésent pour apporter la touche médicale en cas de besoin…
Chez OAK Racing, Arnaud KUZNICKI, Yohann MONCEAU et Emannuelle MAUDET, tous les trois kinés libéraux se répartissent la tâche de « gérer les organismes » des quatre équipages (Voitures N°15,24 ,35 et 49).
Pour les 24 HEURES, comme ils le font en Europe pour les courses d’endurance du Championnat ILMC disputées par le team. Ici, les pilotes, dont une bonne part de gentlemen drivers, se chargent d’établir leur programme de préparation physique générale avec, quinze jours avant les 24heures, des prises médicamenteuses pour dilater les pupilles.
Durant la course, pour la récupération entre chaque relais, l’idée centrale est de gérer les relais de chaque équipage avec le même kiné. Aux 24heures avec quatre voitures c’est un peu difficile, mais il est tout aussi important dans cette écurie, de veiller à la cohésion de l’équipage qu’à l’équilibre psychique de chacun et bien entendu,à l’intégrité de ses capacités physiques.
Pour ce faire, sachant que dans ce type de voitures, la mobilité au niveau des épaules étant réduite, la fatigue des muscles interviendra assez vite à ce niveau , tout comme au niveau des cervicales. En effet le poids du binôme casque-tête étant environ de 6 kilos et la force centrifuge atteignant 3G , on imagine bien qu’avec deux relais enchainés de 40 minutes, à la descente de voiture, les pilotes sont heureux de confier, nuque, rachis et lombaires aux mains expertes qui les traitent à l’étage de l’hospitalité très paisible et confortable de OAK Racing.
A l’instar du patron Jacques Nicolet, qui tient à donner un caractère familial à son team, les kinés travaillent tout autant avec la parole qu’avec leurs mains expertes pour rassurer, encourager, et remettre en confiance si besoin.
Quand on leur demande comment ils tiennent le coup eux-mêmes , du samedi matin 8 heures au dimanche ,largement après 15 heures, la réponse fuse avec un sourire :
« Un podium à conquérir ça booste forcément …. et les boissons énergétiques ça aide aussi ! »
On ne nous communiquera pas la composition du breuvage !
Approche très scientifique outre Rhin, ou approche plus humaniste chez nous en France, dans les deux cas tous les pilotes redoutent la nuit du Mans et ses embûches, tout comme ils ont besoin de soulager des muscles tétanisés par des vitesses de passage en courbe incroyables et des vertèbres extrêmement sollicitées.
Il est loin le temps de la course à deux pilotes, cela date en effet de1982 avec la victoire de Jacky Ickx et Derek Bell sur la Porsche 956 !
Pourtant à trois pilotes, la course est encore et toujours plus difficile à encaisser pour les organismes. Quand on nous parle de réduction des performances, on sourit en enregistrant les temps encore réalisés depuis le lancement de la course !
Il faudrait bien pourtant y parvenir un jour car les organismes pourront-ils supporter indéfiniment sans défaillance, le rythme fou d’une épreuve au demeurant toujours aussi fascinante?
Texte : Alain Monnot
Photos : Patrick Marinoli