24 HEURES DU MANS CAMIONS : L’APOTHEOSE

Samedi 22 heures.

Les tribunes de la ligne droite des stands sont archi pleines, l’ambiance est une sorte de folie, le speaker part dans les tours, la magie se met en place.

C’est le début de la grande parade des 24 heures Camions, ouverte par un attelage étonnant, une boîte de nuit mobile, le DJ (rappel, on prononce didjèye et non didji) Laurent Wolf est aux manettes.

Ses  »pompom girls » dansent en son et lumière, cet étrange semi remorque reste un long moment devant la tribune, trop long d’ailleurs, non pour l’ambiance puisqu’il a face à lui la plus grande boîte de nuit au monde, genre 40 000 personnes, mais parce que derrière et loin jusqu’au Chemin aux Bœufs, des centaines de camions attendent pour défiler, y compris des pièces de collection dont les moteurs surchauffent.

Bref, nuit incroyable.

Qui se finit tard, très tard. Bref, la fête des 30 ans du magazine France Routes est un succès absolu.

Et le lendemain dimanche, dès 8h45, les différents warm up commencent, sous un soleil tropical. Mauvais début pour la malheureuse Jennifer Janiec qui s’arrête sur casse moteur.
Piston et chemise brûlés, pas de pièces chez Man.

Fini.

Pour tous les autres, c’est reparti…

 

TITRES DE GLOIRE

Dimanche treize heures. Un record absolu tombe. Avec 51200 spectateurs, les organisateurs constatent une progression de 8%, ce qui en période de crise prouve que l’enthousiasme de ce milieu du transport permet de conserver toute sa valeur au « panem et circenses » des romains, « le pain et les jeux » étant les deux règles du bonheur.

Puis les Legend Cars restent fidèles au nom de leur discipline, avec un pilote de légende, le belge Guy Fastre (photo no 24), qui gagne trois manches sur quatre, laissant la dernière à son compatriote Watteyne.

Avec un Champion, Olivier Biotteau (photo no 49 en bas article), qui confirme sa bonne saison et un accident de légende, lorsque François Badin (photo, no 27 en bas article) se retourne de façon très spectaculaire dans le bac à sable.

Les Racecars se devaient donc d’être à la hauteur de la journée. Pour leur dernière course, le titre est encore en jeu. Ce sera peut-être Eric Hélary, grande star au Mans dont il a gagné les 24 Heures Auto en 1993, au volant de la 905 Peugeot, Eric qui s’est énormément impliqué dans la création de ce Nascar à la française.

Il prend ce dernier départ en deuxième position au classement général du championnat, derrière Lucas Lasserre (photo, no64) mais tout est encore possible. Mais dès le départ, Lasserre sait éviter le piège. Alors que les pilotes de tête arrivent à trois de front dans la chicane Dunlop, Lasserre est en tête à la Chapelle. Il laissera passer Hélary en fin de course, sa deuxième place lui assure le titre.

Victoire donc d’Hélary, titre pour Lasserre.

A noter les jolies courses de Wilfrid Boucenna, troisième, d’Olivier Pernaud, quatrième et de Carole Perrin, femme pilote qui ne s’est jamais laissée impressionner dans une course aussi …musclée !

 

EPOPEES…



La Coupe de France Camion va évidemment combler de bonheur la foule maintenant très importante dans les tribunes. Noël Crozier, qui nous dit une demi-heure avant la course qu’il n’a même pas compté s’il est déjà champion de France ou pas, (pour la douzième fois !) et qu’il a envie d’envoyer.

Sur la grille de départ il est troisième. A la première courbe Dunlop, il est déjà en tête. Au deuxième tour, on a déjà l’impression qu’il est seul en course quand il débouche de la ligne droite des stands. Et l’on remarque un truc étonnant, alors qu’il est en train de plier la course : ce pilote ne glisse pratiquement pas.

Et dans ce sport, glisser fait perdre du temps. Ce Noël Crozier est décidément mieux qu’un champion, un artiste, une sorte de Léonard de Vinci de la trajectoire.

A l’arrivée, il nous raconte pourtant que ça a failli coincer.

« Au quatrième tour, mon fils est second derrière moi mais assez loin, je m’amuse bien et à l’entrée de Dunlop, en plein freinage, gros blocage et coupure moteur. J’ai cru que j’étais bon pour l’abandon. Et c’est reparti mais mon fils était tout près. J’ai donc dû me battre jusqu’au bout ! »

Et un sourire d’enfer à l’arrivée, quand il ôte sa cagoule en Nomex, 38 ans que ce seigneur du bitume court et il a toujours ses envies d’enfant… Envie par exemple de finir en grand seigneur gagner juste pour le prestige la manche finale. Ce qu’il fait. Décidemment, ce Noël est un cadeau…

RENAULT TRUCKS EN HAUT DE L’EUROPE

On l’a dit, c’est la journée des héros. Dans le Championnat d’Europe, le titre n’est pas encore joué et donc la lutte à mort entre les équipes officielles Man, Renault et Freightleiner ne baisse pas d’un ton.

Mais la course trois est clairement Renault, avec deux pilotes sur le podium, Markus Ostreicht est vainqueur, Markus Bosiger troisième.

Le leader au classement général, Antonio Albacete place son Man en deuxième place à l’arrivée, gardant ainsi une bonne marge d’avance au général.

Dans cette course, le jeune français Anthony Janiec est septième, ce qui est une très belle performance, dans ce Championnat d’un niveau exceptionnel.

Il part d’ailleurs en tête de la manche finale, notre jeune héros. Mais le Man de Hahn, son adversaire (de très haut niveau) préféré, le passe, ainsi que les deux Renault Truck de Bosiger et Ostreich, totalement déchaînés durant cette finale.

Le jeune héros de ce Championnat d’Europe finit donc quatrième, on ne pouvait rêver mieux comme révélation française dans ce sport tellement gigantesque !

Famille Janiec : MERCI

On a dit à plusieurs reprises dans ces colonnes que la famille Janiec est une sorte de bénédiction des courses de camion.
La fille d’abord, Jennifer, qui a donné à quelques uns d’entre nous  le grand frisson de partager son cockpit aux essais.

Qui s’est battue comme une déesse avec hélas une casse moteur qui l’a privée de sa superbe huitième place au général. Elle reste la fée du camion.

Le père ensuite. Qui a acheté un camion spécialement pour venir courir avec sa fille aux 24 heures du mans. Malheureux comme un père peut l’être lors de l’abandon de sa fille, on le voit envoyer du très lourd, devant la tribune Dunlop en délire,  accélérant avec rage dans les courbes où ses petits camarades se font peur…

Enfin le fils, Anthony, qui lui court en Championnat d’Europe, héros de la deuxième manche où il finit sur le podium, toujours placé dans les dix premiers. A tous bravo.

MOTEURS …LE SECRET

Gérard Petraz, responsable de Renault Trucks, évoque le milieu des courses de camions.

« Il y a en Championnat d’Europe des camions d’usine, plus exactement des moteurs d’usine, on trouve deux fournisseurs, Man et Renault Trucks. Dans un marché du transport qui s’est effondré de près de 80%, le seul moyen d e rester en contact avec les clients est celui-là, la compétition. Dans les relais routiers, on ne parle pas de chargement ou de chevaux sous le capot. On parle certes de performances, mais en course. D’ailleurs, sur les compétitions, 98% des spectateurs sont du monde de la route ».

Alors, pour certains teams, que l’on appellera privés, on fournit un moteur  »compétition client ». Pour les teams officiels, on fournit des moteurs dits « d’usine »!

Comme en Grand Prix…

Comme toujours, les moteurs  »usine » sont un peu plus performants. Mais la règle est toujours simple et toujours la même, que l’on soit en Championnat d’Europe ou en Coupe de France : Personne n’a le droit d’ouvrir le moteur, excepté les ingénieurs des marques spécialement amenés  sur les circuits.

Lorsque le pilote réclame telle ou telle amélioration, on modifie les réglages sur des batteries d’ordinateurs, mais personne du team n’a accès aux données informatiques. Pour une raison simple. Les moteurs sont préparés à partir de moteurs de série.

Donner aux teams les données de série équivaut à les publier en place publique.

« Et ça -reprend Gérard Petraz- c’est un secret industriel absolu. Conclusion, sur les camions bénéficiant de moteurs développés en usine, les mécanos n’ouvrent pas les moteurs! »

Jean Louis Bernardelli

Photos : Serge Potier, Gilles Gustine

Camions

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